Par les Drs Sébastien Deleporte résident ECVD et Pascal Prélaud diplômé ECVD, spécialiste en dermatologie vétérinaire
La ciclosporine, disponible depuis 2002 en spécialité chat, est le seul immunosuppresseur avec AMM et le seul médicament avec AMM pour traiter les dermatites allergiques félines. Il est pourtant sous prescrit, la plupart du temps par méconnaissance des indications, ou d’idées reçues sur les effets secondaires. Cette monographie permet de lever le voile sur cette molécule trop peu utilisée.
Elle a été découverte en Norvège en 1970 à l’occasion de la recherche de nouveaux produits antifongique et rapidement utilisée pour ses effets immunosuppresseurs deux ans plus tard. C’est même l’immunosuppresseur de base pour diminuer l’incidence des réactions de rejet de greffe chez l’homme.
C’est un inhibiteur des calcineurines. Les calcineurines sont des protéines phosphatases qui stimulent les NFAT (nuclear factor of activated T-cells) qui interviennent dans la synthèse des interleukines (IL-2, IL-4, IL-5 et INF-gamma). L’ IL-2 a une action précoce sur la croissance et la différenciation des lymphocytes-T (intervient dès la présentation des antigènes par les cellules présentatrices d’antigène (CPA) aux lymphocytes auxiliaires).
La ciclosporine permet donc une inhibition de l’activation et de la prolifération des lymphocytes T de façon précoce. Cette action est réversible et dose-dépendante.
Elle agit aussi directement sur d’autres cibles et notamment les mastocytes, les éosinophiles, les CPA et les kératinocytes.
La plupart des chats atteints de dermatite allergique sont des patients dont la gestion va se faire dans le temps. Après une prise en charge classique et rigoureuse (élimination des puces, régime d’éviction), la réponse apportée est, dans la grande majorité des cas, l’utilisation de corticoïdes. Or, leur utilisation sur le long terme a des effets secondaires majeurs (le principal étant l’apparition d’un diabète). Pour limiter ces risques, l’utilisation de la ciclosporine prend tout son sens et elle doit être utilisée dès le début de la prise en charge. Les effets secondaires sont peu importants (effets digestifs essentiellement) et le simple fait de fractionner la dose en 2 prises quotidiennes permet presque dans tous les cas de faire disparaître ces effets.
Effets secondaires à court terme | |
Abattement, anorexie, diarrhées, selles molles | Réversibles à l’arrêt du traitement.
Effets liés à l’excipient. |
La difficulté est plutôt la galénique : il existe 2 formes, une buvable dont le goût est parfois incompatible avec une prise régulière chez le chat (mais il existe des astuces, cf tableau) et une en gélules d’une taille importante pour un chat (hors AMM mais utilisable lorsque la forme buvable est inutilisable et tout en respectant la cascade des médicaments).
Améliorer l’observance |
Le faire prendre en capsule (les ramollir avec un peu d’eau pour facilité la prise) |
Mélanger avec un corps gras (lait, beurre, olive) |
Donner le médicament 1j/2 (sa demi-vie chez le chat le permet) |
Le cout reste, pour un chat de 5kg, abordable pour la gestion d’une maladie chronique avec un prix propriétaire inférieur à 60 euros par mois lors de la phase d’attaque avec une prise quotidienne et peut être divisé par quatre sur le long terme lorsqu’on diminue les doses à deux fois par semaine.
La surveillance des effets sur le long terme est très simple aucun examen biologique n’étant nécessaire.
Mises en garde / précautions d’emploi | |
Ne pas vacciner un chat sous traitement | Arrêt 15j avant et 15 jours après, précaution à moduler en fonction du bénéfice/risque |
Rétrovirose
Sérologie toxoplasmose négative |
Test FIV FelV et sérologie recommandés |
Utilisation d’autres immunosuppresseurs | Ex : corticoïdes principalement, précaution à moduler en fonction du bénéfice/risque |
Utilisation de médicaments ayant une absorption digestive liée à la protéine P ou une élimination par le système enzymatique des cytochromes P450 | Ex : les azolés (itraconazole), des anti arythmiques (diltiazem), anti-cancéreux, opioïdes (buprénorphine, lopéramide), cimétidine, oméprazole, …
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Autres | Déconseillé chez le diabétique, précaution à moduler en fonction du bénéfice/risque
Surveillance du poids |
Dose et indications | |
dose | 7mg/kg (jusqu’à 10mg/kg)
Réponse en 4 à 8 semaines Arrêter le traitement en cas d’absence de réponse sous 4 mois |
AMM | Dermatite allergique |
Hors AMM | En dermatologie : adénite sébacée, , dermatite idiopathique faciale du chat Persan, furonculose granulomateuse stérile, urticaire pigmentaire féline |
AHAI, asthme, grunlomes éosinophiliques buccaux, stomatite caudale, MICI
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